Les principales applications des TIC dans l’agriculture africaine

Afrique, agriculture, digital

25 Oct 2019

Applications web, logiciels, robots, drones…, le numérique se propage à grande vitesse sur le continent améliorant les performances technico-économiques du secteur agricole. Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) permettront-elles à l’Afrique de mener sa Révolution Verte ?

A l’échelle de l’exploitation

Les rendements agricoles du continent sont les plus faibles au monde. Ceci s’explique notamment par les faibles niveaux d’éducation et de formation des agriculteurs et le faible nombre de vulgarisateurs, (En 2011, l’Afrique comptait un vulgarisateur pour 4000 agriculteurs contre 1 pour 200 dans les pays développés[1]). En mettant à disposition des agriculteurs des formations adaptées pour un gain de productivité immédiat, les TIC pourraient devenir le premier vulgarisateur africain. Le concept a été prouvé par plusieurs plateformes, comme iCow au Kenya qui a permis d’augmenter de 30 % la production de lait de ses utilisateurs[2] ou Digital Green en Ethiopie déjà utilisée par près de 400 000 fermes[3].

Les TIC, à travers les sondes, capteurs et divers outils connectés, envahissent les exploitations agricoles en Occident et conquièrent progressivement le continent via le Maghreb et sa pointe australe. Ils collectent, traitent, stockent et disséminent les données pour des possibilités d’usage infinies allant du pilotage des exploitations agricoles à un observatoire mondial de la production agricole. Les données collectées par satellite ou par drone (échelle plus précise) permettent d’établir une cartographie des parcelles et mesurer leurs besoins en eau, azote et biomasse. L’application d’intrants se fait ainsi, selon les principes de l’agriculture de précision, en fonction des besoins réels mesurés de la parcelle, limitant ainsi les impacts environnementaux et améliorant les performances économiques.

La masse de données disponibles analysées par des modèles prédictifs accompagnent également l’agriculteur avec une incroyable précision dans sa gestion des risques climatiques, sanitaires, mais aussi économiques et environnementaux. Le fermier détecte les problèmes de façon précoce (manque d’eau, besoin de pesticide), il peut donc y répondre plus tôt. Les prévisions météorologiques lui permettent de mieux planifier le travail aux champs et d’éviter au maximum les risques climatiques (gel après semis, pluie avant traitement, etc).

Les TIC incluent également l’ensemble des technologies de robotique et de contrôles automatiques que l’on retrouve à tous les niveaux de la production agricole. Ces technologies visent à réduire la pénibilité du travail de l’agriculteur et/ou lui libérer du temps (Gain de 2 à 3h de travail par jour). Les tracteurs connectés par exemple sont guidés par satellite et permettent de labourer, faucher, moissonner en optimisant l’espace et les déplacements dans le champ. Les drones quant à eux permettent de pulvériser automatiquement et dans des zones difficiles d’accès. Ils peuvent également servir à la surveillance d’un troupeau dans leur pâturage.

L’utilisation de l’intelligence artificielle apparaît également, notamment avec le projet Pix Fruit, codéveloppé par le Cirad et l’Institut sénégalais de recherches agricoles, qui estime la production de mangues à partir de photos prises sur l’application. Ce système permet de réduire les marges d’erreurs sur le calcul de la production et ainsi d’augmenter le revenu du producteur, la production étant souvent estimée au préalable par l’acheteur.

Au niveau du secteur

Grâce aux TIC, les agriculteurs africains sont connectés avec les prix du marché pour l’achat de leurs intrants ou la vente de leurs productions. Dans de nombreux pays du continent, Esoko permet aux agriculteurs de choisir entre plusieurs marchés et de recevoir des offres pour leurs produits. Selon McKinsey, les adhérents à Esoko ont vu leurs revenus croître de plus de 20%.

Les TIC facilitent aussi la contractualisation en permettant d’identifier des producteurs à l’aide d’un simple mobile. Des applications basiques peuvent gérer un registre des producteurs, leur envoyer des messages groupés et suivre les processus d’approvisionnement / facturation. Ce système d’identification par mobile a été utilisé pour lutter contre la corruption dans la distribution d’engrais subventionné. Avant l’utilisation de son programme e-portefeuille, seulement 11% des paysans nigérians avaient accès au système de subvention. Depuis 2012, ils reçoivent tous leurs vouchers par téléphone avec le nom du concessionnaire le plus proche.

Au vu des enjeux sanitaires élevés et de la complexification des chaînes de production agro-alimentaires, les possibilités que permettent les TIC pour améliorer la traçabilité des produits agricoles viennent à point nommé. De nombreux logiciels apparaissent, beaucoup basés sur la technologie blockchain, pour retracer l’histoire de la vie d’un produit du champ à l’assiette et évaluer la répartition de la valeur ajoutée. La branche agriculture Afrique de SAP développe par exemple des solutions pour remonter les étapes de bout en bout en se concentrant sur une filière particulière par pays (Ex : riz en Côte d’Ivoire, maïs au Ghana, pomme de terre au Kenya..).

Enfin, au niveau mondial, la Banque mondiale a créé en 2018 un Observatoire de l’agriculture, qui collecte et partage les données agrométéorologiques afin de détecter les risques sur les récoltes et éviter les famines.

Les nouvelles technologies sont un levier puissant pour augmenter les performances économiques, environnementales et sociales. Permettront-elles à l’Afrique de répondre à son défi alimentaire majeur ?

[1] https://www.scidev.net/afrique-sub-saharienne/cultures/actualites/les-tic-pour-combler-les-lacunes-de-la-vulgarisation-en-agriculture.html

[2] http://classe-export.com/index.php/actus/24940-nouvelles-technologies-developpent-commerce-sante-lagriculture-afrique/

[3] https://www.digitalgreen.org/ethiopia/